L’historienne Isabelle Astic-Rechiniac a redécouvert en 2007 le passé oublié de cette demeure construite au XVIIIème siècle.
Antoine Grisot de Bellecroix, grand maître des eaux et forêts de Lorraine et du Barrois, a fait ériger cette maison, et son hôtel particulier adjacent, en 1725, par l’architecte nancéien Jean-Nicolas Jennesson : elle est donc également dénommée par les historiens « maison Grisot », du nom de la famille l’ayant habitée.
Au rez-de-chaussée, une vaste cuisine donnant sur une petite cour est équipée dès l’origine d’une imposante cheminée et d’un four de pâtissier, ce qui, associé à la présence de Mercure qui fait office de mascaron au-dessus de la porte d’entrée, laisse supposer une destination commerciale des lieux souhaitée par le commanditaire.
Jean-Nicolas Jennesson a également fait le plan et suivi l’érection de l’église Saint-Sébastien entre 1720 et 1731. Il est un des architectes qui ont le plus édifié dans Nancy, et a été breveté premier ingénieur et architecte du roi Stanislas en 1737.
La maison Grisot est achetée en 1767 par Joseph-Antoine Vallet, également grand maître des eaux et forêts, puis devient la propriété de sa veuve Jeanne François Catherine Mathieu qui habite toujours l’hôtel adjacent en 1789. Suite à la Révolution Française, la rue de la Hache est rebaptisée rue de Sidney, et la maison Grisot est saisie comme bien national, les biens de la famille Vallet sont vendus, et la maison Grisot est achetée en 1794 par le sieur Alexis Morot.
Erronément dénommée hôtel de Gormand, la maison Grisot n’est devenue la propriété de François Joseph Gormand puis de sa veuve que par la suite, et ne fit jamais office de maison familiale pour les Gormand.
Au XIXème siècle, elle devient la propriété d’une famille de pâtissiers issue du couple de vignerons Jean Marchal et Agnès Gerardin.
La maison fut ainsi la propriété de Nicolas Muller et de son épouse Anne Marchal, puis de leur fils Joseph Nicolas Muller, de leur petite-fille Marie Antoinette Olympe Muller et de son mari Joseph Louis Vagner. A partir de 1890, du cousin au second degré de Marie Antoinette, Mr Hector Nicolas Moinel, et de 1925 de Marie Eugénie Pierrat, la légataire universelle de ce dernier.
Originaire de Savigny, cette même famille va exploiter au rez-de-chaussée de la maison, pendant un siècle, un commerce spécialisé dans la fabrication de macarons aux amandes à l’enseigne « Les Sœurs Macarons ».
Grâce à l’historien Christian Pfister (1857-1933), Marie Mélanie de Gormand, Marguerite Gaillot et Marie Morlot sont désormais célèbres sous le nom de « Sœurs Macarons », et la maison Grisot sous le nom de « maison des Sœurs Macarons ».
Pourtant la tradition relatée par Pfister en 1909 n’a été vérifiée à ce jour par aucune source d’archives comme le précise le service régional de l’inventaire de Lorraine.
Sans enfant, Marie Eugénie Pierrat se sépare en 1935 de la maison des Sœurs Macarons, et Georges Nicolas Joseph Moinel vend la même année le fonds de commerce.
La maison est alors acquise par les époux Couturieux et le fonds de commerce par Georges Eugène Aptel qui poursuit la fabrication des macarons dans ce lieu séculaire.
La mairie de Nancy décide, en 1952, de débaptiser la rue de la Hache et de la renommer « rue des Sœurs Macarons ».
Le couple Couturieux cède à son tour la maison en 1959. Une campagne de restauration des façades et de la toiture est alors entreprise par le nouveau propriétaire.
La fabrication et la vente de macarons aux amandes se poursuit au 10 rue des Sœurs Macarons, et la maison mère de ce fonds de commerce demeurera installée jusqu’en 1983 au rez-de-chaussée de la maison des Sœurs Macarons.
En 1983, une demande de protection au titre des monuments historiques est déposée par le propriétaire. Les façades de la maison des Sœurs Macarons, son escalier monumental, sa charpente, la cheminée et les fours à bois de la grande cuisine, seront inscrits à l’inventaire des monuments historiques en 1987.
En 2018, le journaliste Didier Hemardinquer écrira : « C’est tout un pan de l’histoire de la cité qui est mis en vente avec la mémoire des fours qui conservent entre leurs briques un procédé de fabrication totalement artisanal. »
Depuis 2019 et une première ouverture aux Journées européennes du patrimoine, le rez-de-chaussée de la maison des Sœurs Macarons est à présent naturellement consacré à la valorisation et à la transmission du patrimoine gourmand de Nancy.
Le musée Fours des Sœurs Macarons a été créé en 2020 par le gérant de la SCI 10 RUE DES SOEURS MACARONS, historien de l'art.